La raison du plus
fort est toujours la meilleure :
Nous l’allons
montrer tout à l’heure.
Un agneau se
désaltérait
Dans le courant
d’une onde pure.
Un loup survient
à jeun, qui cherchait aventure,
Et que la faim en
ces lieux attirait.
« Qui te rend si
hardi de troubler mon breuvage ?
Dit cet animal
plein de rage :
Tu seras châtié
de ta témérité.
Sire, répond
l’agneau, que Votre Majesté
Ne se mette pas
en colère ;
Mais plutôt
qu’elle considère
Que je me vas
désaltérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas
au-dessous d’Elle ; Et
que par
conséquent, en aucune façon, Je
ne puis troubler
sa boisson.
Tu la troubles,
reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de
moi tu médis l’an passé.
Comment
l’aurais-je fait si je n’étais pas né ?
Reprit l’agneau ;
je tette encor ma mère
Si ce n’est toi,
c’est donc ton frère.
Je n’en ai point.
C’est donc
quelqu’un des tiens :
Car vous ne
m’épargnez guère,
Vous, vos bergers
et vos chiens.
On me l’a dit :
il faut que je me venge. »
Là-dessus, au
fond des forêts
Le loup l’emporte
et puis le mange,
Sans autre forme
de procès.
Jean de
La Fontaine
Quelques mots
Se désaltérait :
buvait
A jeun : sans avoir mangé de la journée
Si hardi : si courageux
Breuvage :
boisson
Châtié : puni
Je me vas
désaltérant : je suis en train de me désaltérer
Vingt pas : ancienne unité de mesure
Tu médis de moi :
tu as dit du mal de moi
Je tette encor ma
mère : je bois encore le lait de ma mère
Vous ne
m’épargnez guère : vous me traitez avec peu d’indulgence
- Faites trois listes : les accusations du loup ; les réponses de l’agneau et les informations données par le narrateur (celui qui raconte l’histoire).
- Qui est la victime ? Qui est l’agresseur ?
- Ecrivez l’histoire du loup et de l’agneau sous la forme d’un article de journal.
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